Chak kochon ni sanmdi a yo !


Le Cochon

La plupart des familles vivant à la campagne ou possédant un petit jardin, soignaient des cochons.

Enfermés dans un parc, un coin du jardin délimité par quelques planches, on les nourrissait de fruits et de légumes divers, d'épluchures de légumes, des restes des repas ... Les cochons ne sont pas difficiles : ils mangent de tout.

Toutefois, les services municipaux, "la prophylaxie" intervenait pour tout ce qui concernait l'hygiène et obligeait les gens à observer certaines règles dans l'élevage d'animaux pour la consommation. Par exemple, le parc à cochon ne devait pas se situer trop près des habitations, il ne devait pas y avoir trop d'animaux concentrés dans un même espace. Les contrevenants étaient passibles d'une amende. Pour tuer un cochon, il fallait un permis délivré par la mairie.

Durant le courant de l'année, on en tuait un ou deux, selon l'importance de l'élevage, pour en tirer quelques sous. A la fin de l'année, le plus grassouillet des cochons était sacrifié pour les fêtes de Noël.

La veille de son abattage, on laissait l'animal sans manger. Il devait se contenter de liquides : eau et bouillons gras.

Pour tuer un cochon, les propriétaires de la bête faisaient appel aux parents, voisins/voisines car c'est une tâche qui demande des hommes forts dans un premier temps et des mains expertes pour les diverses préparations. Plus il y avait de monde et plus vite ce travail était achevé, et ce, dans la joie et la bonne humeur.

Le jour J, dès le début de la matinée, on allait chercher le cochon dans son parc. Il ne se laissait pas attraper facilement : il se débattait en poussant de grands cris traduisant une certaine angoisse comme s'il pressentait ce qui l'attendait.

1ère opération : l'égorgement

Sur une solide table dressée pour l'occasion, on couchait la bête. On lui liait les pattes et plusieurs hommes maintenaient fortement le cochon qui se démenait. D'un coup de couteau bien aiguisé, on lui crevait la gorge. Le sang jaillissait, recueilli aussitôt dans un seau. La bête s'agitait encore quelques instants, puis petit à petit, se vidant de son sang, l'immobilité le gagnait : il était mort.

Avec un lélé, on remuait vivement, pendant quelques instants,
le sang récupéré, additionné de sel, pour éviter sa coagulation.

2ème opération : le grattage

Une fois le cochon mort, on le lavait à grande eau pour enlever la terre et les souillures. Commençait alors le grattage : pour retirer tous les poils de la bête, on versait de l'eau très chaude et on grattait aussitôt la partie ébouillantée à l'aide d'un couteau. Une fois cette opération achevée, le cochon apparaissait tout blanc. Pour parfaire ce travail et donner une petite couleur à la couenne, on faisait "griller superficiellement" la bête en le retournant sur un feu de feuillages (feuilles séchées de bananier ou de canne à sucre).

3ème opération : le dépeçage

Ici, les bouchers occasionnels entraient en action pour vider
et découper le cochon.

Pratiquement, rien n'était jeté :

  • les boyaux étaient récupérés (pour le boudin créole) et minutieusement vidés, lavés, citronnés (avec des limes ou des oranges amères) ;

  • la langue ;

  • les joues et la gueule (pour la fameuse "guèl Polius") ;

  • les pieds (pour la soupe) ;

  • les reins (les rognons) ;

  • la queue (qui sera salée et qui finira dans un faitout de pois rouges ou de lentilles) ;

  • les cuisses pour les jambons fumés ;

  • la viande pour les ragoûts ...

  • la couenne ...

Inutile de préciser que toutes ces opérations se faisaient dans une ambiance de fête où la bouteille de rhum ne connaissait aucun répit et où chacun, allègrement, donnait la blague.

 

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