La pli bel an ba la baille (La plus belle est cachée sous la cuve) Une mère avait deux filles : Joséphine et Cècène. Cècène était mal-aimée : cest elle qui faisait la cuisine, le ménage, qui travaillait dur dans les champs. Elle était la plus jolie et plus elle travaillait, plus elle devenait belle. Mais sa mère préférait la paresseuse et capricieuse Joséphine. La mère n'aimait pas Cècène car une diablesse avait présidé à la naissance de Cècène. Le jour du baptême de cette dernière, alors que lon dansait, arriva une femme extraordinairement belle et élégante. Elle demande à la maîtresse de maison de quoi se laver les pieds pour effacer les traces du long chemin quelle avait dû parcourir pour se rendre à la fête. On lui apporta donc une de ces grosses terrines de terre rouge, comme il sen fait traditionnellement au pays pour cet usage particulier. Et quelques instants plus tard on entendit " tik " comme un bruit de fêlure. - Ce nest rien, dit la belle convive, cest juste mon bracelet dargent qui est tombé au fond de la terrine. Puis, parée de ces beaux bijoux dor, elle se jeta dans le bal où elle dansa sans relâche. Puis elle berça lenfant nouveau-né. A l'heure du départ, elle se mit à rire bruyamment en soulevant ses jupes, et cest alors quon saperçut que cétait bel et bien une diablesse. A la place du pied gauche, elle portait en effet un sabot de cheval, sabot qui avait fêlé la terrine de terre rouge. En grandissant, Cècène était devenue une belle jeune fille. Un jour, elle partit, comme à laccoutumée, travailler dans les champs. Tandis quelle coupait la canne sous le chaud soleil, un monsieur à cheval, fort élégant, sapprocha delle. Cècène continua à travailler tout en chantonnant, son grand chapeau " bakoua " sur la tête, un madras noué autour de ses reins. Le cavalier mit pied à terre et sapprocha de Cècène : - Comment tappelles-tu ?
demanda-t-il Le bel homme lui offrit une fleur dhibiscus, remonta sur son cheval et disparu comme dans un rêve. Cècène sempressa de rentrer à la maison pour raconter à sa mère ce qui cétait passé. La mère qui désirait avant tout marier sa fille aînée réfléchit à un plan pour remplacer Cècène par Joséphine. Le lendemain, lorsque le jeune homme se présenta et demanda Cècène, la mère lui répondit quelle nétait pas là et lui présenta Joséphine parée de sa plus belle robe. A ce moment, un perroquet aux couleurs chatoyantes apparut et se mit à crier : - La pli bel en
ba la baille, la pli bel en ba la baille ! Joséphine envoya des cailloux après cet oiseau de malheur afin de le faire taire, mais peine perdue. - La pli bel en ba la baille, la pli bel en ba la baille ! répétait-il inlassablement. Le jeune homme comprit alors, sapprocha de la baille et la retourna. Il y découvrit Cècène, recroquevillée, vêtue de haillons. Tout souriant, il lui tendit la main et laida à se relever. Il la fit monter sur son cheval et ils disparurent tous les deux dans la poussière dun grand galop. Ils vécurent longtemps ensemble, heureux. |